Ce qui fonde ma démarche de peintre,
mon plus humble désir humainement ancré ,
ma haute pré- tension
c’est de vivre en conscience.
Pas plus. Pas moins.
Simple tel une évidence, la vie me semble donnée pour ça.
Je ronge cet os depuis l’enfance, comme l’objet de ma promesse.
Je m’y tiens, m’y adonne sans relâche.
Paradoxalement, ceci s’installe d’une ignorance : être artiste.
Ce sont les autres qui pointent la divergence.
Au commencement, entre soi et l’autre, on n’imagine pas la différence.
On est juste perplexe.
Tout porte à croire qu’on est « le mauvais ange »,
celui qui en son nom dit « non », et défie l’amour de son prochain.
... enfin, l’amour de l’autre,
celui qu’on présuppose son « semblable ».
Créer, c’est aimer tellement...
Trop, d’avantage, par delà... d’une énergie
qui déjà fait acte de traverser, sonder,
fouiner, aller voir comment tout ça tient.
Parce que ça tient forcément à quelque chose.
Ils ( les autres) y tiennent à ce qu’ils disent subir.
A les croire, c’est leur identité, proche d’une fatalité.
Tandis que la vie souriante tient bon,
somme toute, depuis la nuit des temps !
Il suffit d’avoir perçu ce clivage comme lieu de passage,
véritable point de fuite.
Voir,
c’est à dire percevoir l’espace du temps,
comme l’aire de jeu du vivant....est-ce cela l’inné, le don ?
En tous cas, il est vrai qu’on ne l’a pas cherché.
C’est juste là,
percé comme la trouée d’un air nouveau insufflé,
duquel apparaît l’autre côté du miroir.
En dansant, en chantant, en barbouillant ,
qu’importe le moyen : bon gré, malgré, on y va.
Plus exactement : ça y va .
L’oscillation s’opère entre
ce qui existe en soi
et ce qui existe par soi.
Entre les deux, il y a notre propre geste.
Qu’il soit en pensée, ou bien réellement tendu vers.
nous sommes tous acteurs. C’est édifiant !
De véritables entrepreneurs, des bâtisseurs en tous genres...
Tel est le lot de chacun.
Tout le monde crée.
Tout le monde adhère à ses propres illusions.
C’est en effet juste une histoire de conscience
à laquelle s’ajoute généralement,
_ je veux dire pour « l’homme du commun à l’ouvrage »_
l’inconscience tant du support souvent dévié, que de l’outil.
De là, dans tous les cas, s’impose un langage familier comme une seconde peau.
Il s’agit d’un langage adressé au monde,
à cette vie qui soi disant est « ça ».
Créer re – présente notre voie désirante, sans doute délirante,
donc notre manière d’aimer.
Ma démarche en réalité, mon alphabet en images,
ma voix d’encre,
fait trace et donne à voir le déliement de mes dédales.
Ma peinture matinale jongle avec les tonalités.
de la lumière naissante,
dont je m’obsède du secret des contrastes.
C’est après un long chemin en noir et blanc
que la couleur a fini par m’apprivoiser.
Longtemps, je l’appréhendais
Je continue de ne pas l’anticiper.
Elle me surprend et sans cesse m’épate.
Chez moi, à l’origine, en mon monde, ça commence ainsi :
Tout se dessine. Tout est langage.:
_ L’art graphique ou l’histoire humaine à travers le monde,
se dévoiles par traits.
_ La philosophie et le champ du sacré indiquent
comment visiter l’évolution des croyances
et l’archéologie de la pensée dans sa chronométrie.
_ la psychanalyse, témoin impertinente
toujours interroge la véracité du Sujet.
Participent à mes transports :
_ l’image en mouvement du cinéma
_ la musique en tant que source du mouvement,
_ la danse corollaire, ou l’immanence du corps présent.
Mes passerelles en kit se situent dans
la philosophie des mathématiques et des sciences,
revue et corrigée
via l’agencement de mon désir
dont la visée est la justesse du trait,
mon os privilégié à ronger dont je ne démords pas.
« Créer c’est aimer ».
Réciproquement,
aimer crée en occupant le champ du manque
dont l’objet se loge à l’horizon,
dans un espace tiers opératoire.
On saute à pieds joints à l’intérieur du vide, au coeur du trou,
au dedans de la faille, dans le rai de l’interstice.
C’est là que ça vit d’un tout possible.
L’ampleur du réceptacle dépend de la liberté du geste constructeur
qui ouvre une seule chose : le temps suspendu de l’envol.
Heidegger et Giono ne font qu’un à mes yeux
quand ils invoquent la provenance de la terre.
Laborit, François Jacob, Atlan y vont du même écho.
Mais c’est Platon qui a commencé à rapporter les mots
des questions du beau, du bon et du bien,
que la terre au préalable avait déjà données.
Il en dénonce « l’ignorance comme :
ayant ceci de particulier qu’elle ne contient
ni beauté,ni bonté,ni science.
Et celui qui ignore ce qui lui manque,
il ne peut le désirer. »
J’appelle « la terre », la vie, le vivant.
C’est ce que j’ai reçu.
En posant que « tout est langage »,
le mien, l’élu, mon familier,
celui qui me permet de toucher l’invisible,
de déceler l’impossible dire,
c’est le dessin qui d’un trait,
donne à voir l’aller vers
ce que depuis toujours je vois,
du fait d’entendre des paroles visiblement désordonnées,
prononcées avec une telle dissidence quant à leur sens,
que je n’ai jamais cessé en effet,
d’éprouver une sorte de mal fait aux mots.
En lieu et place d’un discours fluide,
qui se serait satisfait d’articulations savantes,
ce sont des percepts qui ont pris existence,
desquels se forge un langage propre,
érigé d’un artisanat intérieur.
Impossible de jouir d’abord de l’usage des mots mis ensemble.
A contrario, isolé, le mot me comble.
Je garde en mémoire ce souvenir jubilatoire
d’avoir appris à lire seule,
juste au hasard de plongées dans le dictionnaire.
Les sons déchiffrés m’ont fait rêver d’autant,
qu’ils ouvraient sur une définition,
ferme et forte comme La Grande Loi dictée de la vie,
dont le champ concret immédiatement lisible,
m’exprimait là, les secrets réels indicibles de la terre.
Les mots se sont présentés en tant que supports visuels
comme des balises à trouver, ou des signes à déposer
permettant d’élaborer un parcours qui fait sens.
Chaque mot est une balise / valise.
Il faut que je peigne
car tout commentaire ou mise en doute de ces repères
m’ébranle au plus profond de moi-même,
va jusqu’à me désincarner, dissoudre ma présence au monde.
Or j’ai choisi le langage du trait qui par essence fait trace
sans doute pour me sauver d’une forme de folie,
c’est à dire de la folle errance
que le clivage entre parole et acte m’a insufflée.
« Tout commentaire » n’induit pas « toute confrontation ».
Le goût de la rhétorique,
les jeux avec le sens des mots et des idées
m’ont toujours animée joyeusement,
selon la manière dont se créer le tableau.
Il y a dans le mot, une esthétique sonore, une tonalité colorée,
une matière plastique, un magnétisme, un mouvement,
un rythme donc, une lumière, une porte ouverte,
un monde possible.
Et je jouis des mots.
Mon désir est là.
Ils sont la terre à modeler.
Dit ainsi, s’entend mieux sans doute,
mon rejet spontané contre le principe de narration,
avec ses mots de trop, toute cette surcharge étouffante
qui prend la place du sens clair et distinct,
dès lors que si souvent, ça parle pour ne rien dire,
juste avec l’intention de remplir l’espace du vide,
du manque à vivre en conscience.
Le mal fait aux mots
tient au fait qu’ils se disent en se perdant,
et ainsi témoignent de toute l’affliction machinale
de ceux qui les gaspillent,
sans s’entendre parler.
Quiconque ne suppose pas qu’une pensée est le fruit d’un geste lisible,
n’entend rien de ce qu’il dit.
Il ne voit pas sa tristesse circuler, qu’il distribue généreusement,
en rendant impuissant le récepteur.
Car le bavardage généralement,
s’institue sur la déviation empruntée inconsciemment pour dire
via un prétexte détourné,
la chose qui fait écran à la réelle conversation ouverte,
située dans l’interstice, entre un mot lâché et l’autre oublié,
comme un avortement insu chaque fois, de ce qui fait sens.
Le mal fait aux mots me renvoie à l’état du nourrisson,
« l’impitoyable » ainsi nommé certes, selon Winnicott,
mais à l’état d’effroi de ce petit monstre qui crie
contre l’allégeance.
Alors, mon chemin de peintre... qu’est-il ?
De quoi est-il composé ?
J’y suis une ingrate passante.
Je saisis.
Je pille les discours d’un maximum de champs d’expériences.
J’y vais voir. J’apprends leur spécificité.
Je saute sur les passerelles analogiques.
J’ouvre toutes portes
d’une discipline à l’autre.
Je m’approprie ce qui fait sens.
Je chaparde sans cesse.
De mon univers d’avant l’acquis du langage
je me comporte en pure délinquante du verbe.
Néanmoins,je m’y donne toute,
corps et âme..
Car « ce n’est pas tout d’aimer la peinture,
encore faut-il qu’elle nous aime » disait Dali.
L’art , à l’état de bricolage initial,
c’est comme une troisième main,
une tête en double,
deux paires d’yeux et d’oreilles,
enfin le machin surajouté tel une prothèse,
encombrant et privilégié à la fois,
permettant d’avancer en y voyant clair.
C’est un soutien rigoureux, sorte de père sévère,
quelque chose comme le champ énergétique
rendant présent quoi qu’il m’arrive,
les questions que la vie _ ou bien le monde _ soulève.
Tout état d’âme est une énergie à exploiter
prétexte d’une traversée.
Tristesse, joie, qu’importe !... c’est tout comme !
Ne plus avoir peur d’avoir peur,
là est le bonheur acquis d’un travail psychanalytique.
« Ne débandez jamais »
me répétait le vieux peintre
à qui, les premières années, je montrais mon travail.
Cette fonction jouissante fait figure de moteur.
La psychanalyse à laquelle j’ai tenue depuis les premiers instants,
en l’espèce, prend valeur de focale,
de fenêtre, d’éclairage, de main tendue au service du sens...
Elle participe à l’élagation visée,
m’octroyant le souffle nécessaire
pour respirer à l’intérieur des mots
et voir au travers.l’écran résiduel de ce qui m’a faite telle.
La pratique de l’art décrit ma langue maternelle,
de cette mère- terre nourricière hallucinée,
d’avant le langage usuel,
qui fait re- naissance.
C’est avec sa grammaire, sa syntaxe
qu’il m’est permis de me reconnaître
une légitimité absolue à jouir de la vie,
à fonder rigoureusement une éthique
sur des valeurs esthétiques,
tel que l’humanité toute entière
m’a inspiré la curiosité des explorations possibles à l’infini.
La question du sens, revue et corrigée
par les hommes depuis la nuit des temps,
en tous lieux, sous la prégnance de leurs cultures,
et à travers un maximum de leurs langages,
( sans doute leurs langues maternelles aussi...)
voilà ce qu’il me plaira toujours d’aller visiter
sous prétexte d’être peintre.
Car je me pose d’emblée en héritière responsable,
quoi qu’on m’ait dit
du déterminisme de l’art contemporain,
qui se charge d’affirmer son originalité et sa suprématie
en défiant les siècles précédents.
... Des mots aveugles et sourds,
auxquels je n’ai jamais pu adhérer une seconde.
Très tôt, je me suis sentie passeur,
riche d’une appartenance.
Du coup, a-t-il fallu s’impliquer dans des fouilles multidisciplinaires,
aller creuser dans la mémoire du temps,
afin d’ouvrir la voie à venir,
en connaissance de causes.
Grand bien me fit de déplacer mes études des Beaux – Arts,
vers celles du septième,
car pour exprimer un art vivant comme en ma promesse,
la question du mouvement s’est avérée essentielle.
Les richesses du cinéma .
Plongée, contre-plongée, travelling, avancée au zoom...
Le rapport au cadrage, à l’angle de vue pris,
à la lecture déchiffrée du sujet qui entre dans l’image et la traverse,
distinguée de celui qui quitte le sujet pour aller voir ailleurs.
La profondeur de champ, l’histoire animée dans l’histoire même,
l’induction musicale, le fondu au noir...
enfin toutes ces bribes syntaxiques de l’impossible dire à la fois,
ont contribué à me faire entrer dans ce monde d’Alice,
de l’autre côté de ce qui fait écran,
visualisant sans cesse, l’écart présent en toute chose,
invitant à traverser au sein de l’éternel subdivisible,
sans jamais conclure.
C’est là que ma vision des maths jouent le rôle de souffleur
concernant l’architecture des idées,
et que mon interprétation des sciences
valide rationnellement un tel donné à voir.
Entrer dans l’image invite à découper des plans.
Il faut d’abord poser une lumière,
la métaphore disant : un éclairage.
Dès lors on peut déjà nommer la présence d’un parti pris
d’où il va s’agir de réguler,
d’orchestrer un laisser venir chaotique,
tout ça, grâce au temps ouvert en amont,
délivrant d’autant les affres possibles de l’espace spéculaire.
Ensuite vient la question du découpage, du montage, de l’élévation
en rapport à une ou plusieurs lectures probables,
données à voir.
Par pur hasard, j’ai trouvé dans le cinéma
de quoi peindre tout de suite en rajoutant un autre mouvement,
celui du sujet qui de l’extérieur, regarde.
Du format A4, je suis passée aux fresques.
C’était trop grand pour se voir en une fois.
Le spectateur devait marcher le long de ma peinture,
et pratiquement, sautiller sur mes variations rythmées
qui habitaient mon geste,
grâce à la musique
avec laquelle je construisais ces immenses panneaux.
Sous ce prétexte, durant plus d’une dizaine d’années,
je me suis ainsi investie dans la construction d’immenses panneaux.
Mon intention était de faire surgir l’art où on ne s’y attend pas,
de faire parler l’art où les mots avancent masqués,
d’y mettre « les jambes » comme aux bateaux de la comptine,
qui vont sur l’eau pour marcher.
Ces histoires de jambes liées aux mouvements de la marche,
me hantent profondément _ c’est sûr_ comme défiant l’inertie.
Car le plus gratuitement du monde, depuis mon enfance,
je déplace des pierres d’un pays à l’autre
afin de leur prêter mon potentiel de déplacement
puisqu’elles en sont dépourvues.
J’aime me raconter que grâce à mon transport, ( à mes jambes prêtées)
elles peuvent fréquenter leurs semblables
qu’elles ne connaissent pas,
rendant hommage au fait que chacune me parle,
c’est à dire me rapporte l’histoire de son paysage...
Sur mes toiles, je prolonge les éphémérides ,
en juxtaposant des sables venus des 4 coins du monde,
aux pouvoirs magiques comme celui d’une poudre,
ouvrant la lisibilité indiscrète d’un dialogue secret .
C’est calqué sur cet enchantement identique
que j’appose des couleurs qui semblent se heurter par leur contraste,
alors qu’à mes yeux, ça chante, danse et converse
grâce aux rencontres dont je m’amuse à être le maître d’oeuvre.
De même, avec les symboles sacrés de différentes civilisations
j’ai longtemps joué à mettre en scène dans mes fresques,
l’art égyptien fréquentant l’africain, en conciliabule avec l’inca,
l’art indou et l’occidental, sans la moindre anicroche.
Eh oui .... même si je l’admire infiniment,
ce n’est pas Picasso qui m’a inspiré l’usage des formes géométriques.
Elles étaient disponibles bien avant lui !
En se baladant ainsi via tous les concepts,
toutes les disciplines et leurs langages à travers le monde,
j’ai toujours pu improviser spontanément des projets d’exposition.
Ma préférée s’est tenue dans une bibliothèque pour enfants
où j’ai pu convaincre de rapporter la longue épopée de Gilgamesh,
y faisant coïncider les étapes de mon propre parcours de peintre,
tout en produisant un livret des questions philosophiques
soulevées dans ce sublime ouvrage,
le premier écrit vieux de 5000 ans.
Pour autant, j’ai cru bon dès lors, de décider
de suspendre la réalisation de peintures murales,
en m’efforçant de centrer mon discours,
au coeur d’une toile d’un format plus « raisonnable »
c’est à dire en rapport à ma dimension physique : 60 F.(soit 60 Figure).
Or ce n’est pas simple !
J’ai vécu le sentiment de m’enfermer dans un placard durant 3 mois
en m’imposant de peindre en neuf cm sur treize.
Fini le spectateur qui marche le long de ce que je donne à voir !
La question a été de me demander
de pénétrer et de circuler dans la profondeur du tableau.
En même temps, s’est revisité l’éternel conflit
de la ligne séparée de la forme, distincte de la couleur et de la matière.
Car mon entêtement s’applique au dessin que je refuse de laisser choir.
Je le veux là toujours présent,
même si toutes mes aventures avec lui,
sont évincées, jetées ou données,
alors que j’aime tant voir les dessins préparatifs des artistes en tous genres.
Sans doute vais-je vers ce qui se dit d’un trait et pas plus.
... genre, en un mot !
Ce que j’ai trouvé là nettement plus parlant encore,
se résume à un point.
En effet, la ligne, courbe ou droite, est un ensemble de points.
La couleur rend présents une densité de points.
La forme s’obtient par l’étalement de la couleur,
ou bien par la réalisation d’un contour, le trait donc,
ce qui est chaque fois un ensemble de points.
... Faire le point.
Créer c’est l’acte de partir d’un point vers le deuxième.
Tout s’opère là, entre deux
et indique une direction,
au coeur d’un espace tiers dit « de construction »,
à la merci du souffle tendu.
Tout se situe entre « je sais »
s’ouvrant vers « je n’en sais rien ».
Ainsi, penser la ligne droite par exemple,
ne revient plus seulement à traverser la toile d’un trait.
Avec juste un point posé,
c’est la toile qui est traversée en profondeur,
par la ligne ( ou ensemble de points)
laquelle, si je me mets en face,
me traverse également.
Partant de là, ma relation à la fresque subsiste.
Elle s’élabore en rapport à la profondeur explorée dans le cadrage,
de quelque format que soit mon tableau.
Ce n’est plus littéralement que s’anime l’image,
mais transversalement, comme dans la considération
d’une pâte feuilletée, avec des plans scanerrisés.
Dès lors,
tout se passe entre chaque point, chaque plan, chaque forme,
que je fais tournoyer, que je plisse ou traverse.
Rendre présent n’est pas tout représenter, tout dire.
C’est occuper son absence qui fait vivre la forme.
On est bien là, dans l’univers d’Alice.
En même temps, je rejoins ici le monde de René Thom
dans sa « théorie des catastrophes »,
distinguant les éléments discrets des continus.
Vient ensuite la ‘notion de pli », exprimée par Leibniz.
puis transcrite plus clairement avec Deleuze.
Notons que Deleuze est allé voir aussi dans le monde d’Alice
pour développer « La logique du sens ».
A cet endroit, la psychanalyse gagne à tendre l’oreille.
Ces allers / retours au fin fond du tableau
sont d’autant allègres et sans encombres
qu’on a effectué le travail en soi, sur soi,
qui délivre en paroles les clés de passages,
désamorce toute tentative de dramatisation victimaire. .
Les plis de l’âme sont des hallucinations
qui donnent à imaginer le heurt avec des murs composés,
qui donnent à voir des lignes étrangement distordues,
alors qu’il s’agit du sommet de plis à défroisser,
en visitant les creux de notre propre histoire.
En bref ici, on peut dire que chacun est comme un paysage,
voire un paysage qui se réduit au point,
ou bien, à la pierre dont je parle plus haut.
Oui l’idée est toujours de léguer des jambes,
de mettre encore en mouvements,
de délivrer un souffle,
de donner vie certainement..
Arpenter son paysage, revient à le déplier point par point,
c’est à dire à prendre connaissance, mot à mot,
du contenu de nos histoires ,
en déchiffrant la manière dont on a pu les déposer, les mettre en scène,
pour se défendre ou seulement s’adapter à un autre point noueux:
la cellule familiale.
Notre histoire dépliée devient alors un discours adressé,
disponible à la circulation du sens.
Cette expérience conjointe de l’art et de la psychanalyse,
donne à penser dans l’espace philosophique,
notre présence au monde.
C’est en cela, que ces trois disciplines
se conjuguent naturellement au creux de mon ouvrage.
De peintre, je trouve l’élan créatif prolongé
dans l’art- thérapie, soit un rapport au monde, à l’altérité,
dont je ne saurais plus me dissocier.
.Néanmoins peintre, reste à jamais mon état premier,
pour aborder la psychanalyse,
ces deux activités s’attachant à la délivrance du désir.
Ma peinture porte toutes les questions du vivant.
Elle est mon langage, ma matrice, mon lieu d’aventure humaine.
Je réside là.
J’y vis. J’existe avec elle.
Je ne suis que ça.
Elle m’a rendu disponible le contenu d’une caisse à outils,
que je prends plaisir à transmettre,
comme d’autres cultivent la terre,
font fleurir des jardins.
Mon accompagnement analytique est le geste corollaire
à la création du tableau.
Sauf que, directement ouvert à l’Autre,
les avatars de ma recherche personnelle
s’avèrent plus amples et résonnants,
remis en cause sans cesse,
même si, comme je l’ai toujours fait,
je suis consciente de ne peindre au moins qu’un tableau sur deux.
... par amour des mots libérés.
Toutefois, où de ce fait,
je ne cesse de peindre aussi , sans peinture ni toile.
Fond et forme se rejoignent implicitement.
Le dedans et le dehors s’articulent, se reflètent.
Ils se renvoient l’un à l’autre
dans l’acte d’apparaître et de disparaître,
de dévoiler et de masquer
oscillant comme le souffle des vagues
donné à voir sur le rivage.
S’annoncer peintre avant toute chose,
dit la voie d’existence,
révèle l’usage d’un langage, indique un lieu de résidence,
donne à voir la manière d’habiter un espace, de circuler
et d’incarner sa propre vérité.
Aussi panse – je le mal fait aux mots.
Je répare. La peinture est mon garage.
J’étire la langue de l’impossible dire,
posant qu’à l’horizon
la justesse s’érige d’un trait,
sur les chemins qui vont nulle part.
Bibliographie ( mes ouvrages péréférés) :
Grothendieck : "récoltes et semailles".
René Thom : "Prédire n'est pas expliquer".
René Guitart : "Évidence et étrangeté"
"La pulsation mathématique".
Clément Rosset : "Le réel et son double"
""Le principe de cruauté".
Lacan : "Encore".
"Des-Noms-du-Père".
Deleuze : "La logique du sens".
"Le pli".
Merleau-Ponty :"Signes"
Winnicott :"La nature humaine"
"Conversations ordinaires"
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